Le territoire comprenant aujourd’hui la commune et paroisse de Joué en Charnie, faisait partie avant J.C., avant même la conquête romaine, du pays gaulois des Arviens (Arvü ou Aruvü).

L’on sait que cette nation dont la capitale était Vagoritum, formait avec les Diablintes, capitale Noivdunum (Jublain dans la Mayenne) et le Cénomans, capitale Suindunum (aujourd’hui Le Mans), la confédération des Aulerces Celtiques, peuple belliqueux, qui prirent une part actives aux guerres Gallo-Romaines, et ne se soumirent que des derniers aux armes victorieuses de Jules César.

Les historiens s’accordent à dire que ces trois peuples confédérés des Cénomans, des Diablintes et des Arviens occupaient à peu près l’étendue de pays compris aujourd’hui dans les limites des deux départements de la Sarthe et de la Mayenne.

Pour la petite contrée des Arviens, le célèbre géographe Danville lui assigne sans toutefois affecter trop de précision, le territoire composant anciennement (jusqu’à la révolution) les doyennés de Brûlon, de Sablé et de Laval, c’est à dire environ 120 paroisses parmi lesquelles Joué en Charnie.

Nous estimons que cette dernière devait se trouver sur l’extrême frontière est du pays, la rivière du Palais servant très probablement de limite naturelle entre les cénomans et les arviens, comme plus tard entre la Champagne et la Charnie, puisque d’un côté nous trouvons Neuvillette en Charnie, Etival en Charnie, Chemiré en Charnie, Joué en Charnie et de l’autre côté Montreuil en Champagne, Loué en Champagne, Mareil en Champagne.   

La capitale de ces peuples, nos ancêtres reculés, était, nous l’avons dit Vagoritum, longtemps ignorée, mais enfin découverte au siècle dernier et confirmée dans celui-ci.

Ce chef-lieu ou oppidum des Arviens, était situé sur la rive gauche de l’Erve (Arva), dans un angle formé par le cours de cette rivière, sur un terrain élevé, accessible seulement au nord, et défendu sur tout le reste par des rochers à pics, ayant jusqu’à 20 mètres d’élévation du côté de l’Erve. L’enceinte dont l’on voit encore quelques fondements, avait environ 300 mètres de long sur 200 mètres de large.

C’est l’endroit nommé la cité, non loin de Saulges et de Saint-Pierre sur Erve, au nord de la 1ère et au sud de la 2ème  de ces deux communes du département de la Mayenne.

Il est impossible de savoir si, dès cette époque, Joué  était un centre d’habitations.  Evidemment ce peuple des Arviens devait avoir, disséminés sur toute l’étendue de son territoire, plusieurs groupes de mansiones ou demeures.  La cité de Vagoritum en effet, qui était plutôt une citadelle ou forteresse qu’une ville proprement dite, ne pouvait contenir tous ses habitants. 

Mais où se trouvaient et qu’étaient ce que ces mansiones de nos pères, voilà ce qui échappe à toute investigation.

En général, les Celtes ou Gaulois, peuples demi-nomades, adonnés à la chasse et aux armes, n’avaient point de demeures fixes et ignoraient totalement le luxe de nos cités modernes.

Leurs habitations consistaient en huttes faites de terre et de branchages, qu’ils abandonnaient aisément au premier danger, pour se réfugier avec leur famille et leurs troupeaux, dans leurs forteresses à l’abri de l’ennemi.  En temps de paix, ils recherchaient de préférence le voisinage des sources, des montagnes et des forêts ; c’est là qu’ils aimaient  à s’établir.  Ce goût des lieux sauvages était entretenu chez eux par leur religion.  Les Druides en effet affectionnaient particulièrement les retraites inaccessibles, l’impénétrabilité profonde des forêts, qui donnaient à leurs farouches mystères un cachet plus religieux et plus dramatique.  Aussi les arbres séculaires, surtout les chênes, les fontaines, les pierres gigantesques (menhirs, peulvens, dolmens) les mottes ou tombelles (tumuli), formaient-ils les monuments les plus ordinaires du culte des anciens Gaulois.

A ce titre Joué et son territoire, était merveilleusement propre à l’établissement d’une mansio arvienne.

Son sol montagneux, entrecoupé, couvert de bois giboyeux, abondant en fontaines, réunissait toutes les conditions de la vie sociale et religieuse de nos ancêtres.  Pour affirmer que la chose a eu lieu ainsi, que Joué a été réellement le siège d’une villa gauloise, il ne nous manque qu’un point mais qui a son importance, c’est une preuve péremptoire !… serait-ce une témérité que d’en voir l’apparence au moins d’une discutable, dans cette motte seigneuriale, existant encore aujourd’hui sous le nom vulgaire de Butte à Tessier (¹), située sur le bord du Palais au dessous du village de la Poterie, non loin du chemin de Chemiré ?..

Il est certain que nous là un travail de main d’homme (la forme de la colline à laquelle est adossée cette motte, et les arbres qui couvrent ses flancs et son sommet, ne permettent pas d’en douter : il est clair qu’un soulèvement géologique  se produisant dans un espace si restreint, eut mis à nu les roches divoniennes qui caractérise le terrain voisin, et par conséquent, rendu impossible toute plantation. Du reste, la tradition populaire  qui y voit aussi un travail humain en attribue l’érection aux anciens seigneurs de Beaumont, Château voisin.), une motte ou tombelle, un merck, un tumulus, d’où les plus grands seigneurs connus de Joué, de l’Hommois, paraissent avoir tiré leur nom patronymique.  Toute la question est de savoir si cette motte est une œuvre, une création de la féodalité ou si existant bien avant la féodalité, cette dernière n’a fait que l’utiliser, pour obéir à l’usage du temps qui faisait rendre tous les arrêts de justice, au pied des mottes semblables.

Ici nous ne prendrons point de décision, et pour ne pas nous tromper, nous laisserons la question dans son état hypothétique ; c’est à nos yeux le parti le plus prudent.  Il n’en sera pas de même pour l’époque suivante, l’époque Gallo-Romaine ; là nous aurons bien quelques raisons d’oser plus.

Lorsque vers l’an 56 avant J.C. Jules César en huit campagnes mémorables, eut soumis toutes les Gaules, notre pays eut à subir certains changements.  Nous avons déjà dit qu’il fût un des derniers à se rendre aux envahisseurs.  A la fin, l’antique valeur des Aulerces celtiques, qui jadis avaient fait trembler Rome, dût céder devant la discipline et la science militaire des soldats de César ; ceux-ci, pour se rendre maîtres du pays, désarmèrent les habitants, construirent ça et là des camps retranchés où ils laissaient un certain nombre de légions, puis rebâtirent  les cités gauloises qu’ils fortifièrent d’après leur système, et partout ils tinrent garnison.

C’est ainsi que les villes de Suindunum (le Mans), de Noiodunum(Jublains) et de Vagoritum, portent les traces évidentes d’une reconstruction de leur enceinte par les romains.  On montre encore à Jublains, les vestiges réellement considérables d’un de ces nombreux camps retranchés que César fit exécuter partout pour prévenir et étouffer les révoltes des vaincus.

Mais les vainqueurs ne s’en tinrent pas là.  En conquérants habiles, ils voulurent s’attirer par les bienfaits d’une civilisation jusque-là inconnue, les peuples qu’ils s’étaient soumis par la force des armes.  Dans ce but, ils favorisèrent le développement des villes, créèrent des routes larges et commodes, établirent des impôts réguliers, particulièrement la capitation, inculquèrent le goût des arts et de l’industrie, par la construction de monuments publics, théâtres, temples, cirques, bains publics ou thermes, aqueducs, etc…

Ils respectèrent, du reste, la religion nationale, en permettant le libre exercice, et la hiérarchie antique, en décernant certains honneurs aux chefs gaulois.    Puis à leur culture précaire et peu productive, ils substituèrent une culture plus intelligente et plus fructueuse.

Pour y parvenir, ils établirent de divers côtés, sous le nom de lites (de lati : transportés) des colonies de gens étrangers à la Gaule, composés pour la plupart de prisonniers de guerre ou de vétérans de l’armée romaine, libérés du service.

Ces colonies (coloni) auxquels l’état romain donnait à cultiver des terres dont il leur abandonnait ensuite la propriété à certaines conditions, ont existé dans le pays et tout autour de Joué.

On les retrouve aujourd’hui dans les noms voisins de Coulaines(en Loué), de Coulans ou Coulens (dictionnaire statistique et historique de la Sarthe : Pesche), de Conlie, qui paraissent tous dérivés ou corrompus, suivant les étymologistes, des mots latins coloni et colonix.  Pour les deux derniers Coulans et Conlie, le doute n’est pas possible ; des fouilles entreprises au siècle dernier et au nôtre, y ont fait découvrir des traces irrécusables des romains, telles que médailles, briques, chapiteaux et fûts de colonnes, etc…

Pour le premier, Coulaines, terre très ancienne de Loué, ce n’est qu’une hypothèse de notre part, appuyée cependant sur la conformité de nom avec la paroisse de Coulaines, près Le Mans, à laquelle les auteurs assignent la même racine.

Les colons romains ne se livrèrent pas seulement à l’amélioration de l’agriculture ; ils cultivèrent aussi toutes les branches qui s’y rattachent, l’élevage du bétail consistant alors en bœufs, moutons et porcs, le plant de la vigne importée d’Italie, etc…   

Ayant découvert avec le flair qui leur était naturel, en différents endroits d’excellente terre de potier, ils se mirent à façonner et à cuire en de petits fours, tous les objets, vases, ustensiles, nécessaires à la vie domestique.  Ils apprirent aux indigènes leurs procédés nationaux et vulgarisèrent ainsi l’art céramique, d’où sont venus tous ces débris de belle poterie romaine, que des fouilles quotidiennes mettent au jour sur tous les points de la France.  Le nom de la Poterie, les Poteries, donné si fréquemment dans nos contrées à des fermes, villages ou hameaux, n’est autre chose que le nom d’un ancien atelier de potiers romains, durant leur séjour dans le pays.  Nous n’hésitons pas à reconnaître la même origine au village de la poterie de Joué.  Il en est de même pour les forges à bras qu’ils multiplièrent partout, et dont les scories qui remplissent certains champs, pâtis ou landes, avec le nom de Forges porté par un si grand nombre de fermes ou hameaux, sont encore aujourd’hui les indéniables témoins.  A ce titre le hameau des Forges, situé à l’Est du bourg nous paraît un ancien atelier romain.

Nous avons dit plus haut que les romains, par une sage politique, s’efforcèrent de respecter les institutions des vaincus.  Ils allèrent même jusqu’à conserver les anciennes délimitations du territoire.  Ainsi le pays des Arviens garda ses limites, pareillement celui des Cénomans et des Diablintes.  Seulement ils leurs donnèrent des dénominations nouvelles, la langue des vaincus devant céder le pas à la langue des vainqueurs.  Le territoire des Arviens devint donc une Vicaria, apparemment le nom du fonctionnaire romain préposé à sa tête, Vicarius proefectus, résidant au chef-lieu dont le nom antique lui-même se latinisa en Vagoritum et qui reçut le titre d’oppidum.

Les autres centres d’habitations importants, répandus dans la Vicaria, prirent le nom de Condida ou Pagus, et les moindres furent des Vici (de vicus).   En même temps pour unir entre elles les différentes provinces ou Vicarix, et écarter tout danger d’insurrection, de nombreuses voies romaines sillonnèrent les pays.  Depuis quelques années on a retrouvé et suivi la trace de l’ancienne voie qui reliait Suindunum (le Mans) avec Vagoritum (entre Saulges et St.Jean sur Erve).  Les endroits les plus rapprochés de Joué par où elle passait, sont à six kilomètres sud, le carrefour des 6 chemins, (commune de St.Ouen), et le château de l’Isle (commune de Mareil).

Sous l’action bienfaisante de l’administration romaine, le pays ancien changea de face.  Les terres mieux cultivées, les prairies nourrissant de plantureux troupeaux, les collines couronnées de vignes, les communications facilitées, les centres d’habitation multipliés, les villes embellies et plus populeuses, firent sentir à nos pères les avantages de la vie civilisée sur la vie barbare, et peu à peu  s’attachent à leurs vainqueurs, ils se lièrent à eux par des unions qui donnèrent naissance à une nouvelle race, la race Gallo-Romaine.

Un siècle et demi à peine après la conquête des Gaules, lorsque les 1er évêques du Mans ( St. Julien, St. Thuribe, St. Pavace) vinrent prêcher l’évangile aux Cénomans ainsi qu’à leurs voisins les Diablintes et les Arviens l’activité romaine avait déjà produit une partie de ses fruits.  Les pagi et les vici avaient atteint un chiffre fort respectable, et l’on n’en compte  pas moins de 35 où, d’après le pontifical du Mans, St.Julien établit une église.

Nous citerons parmi les plus rapprochés de Joué (histoire des évêques du Mans par Guyard d la Fosse)  les lieux qui suivent : Brûlon(Brucilonum), Chevillé(Caviliacum), Saulge(Salvia), Noyen(Noviomus), Sillé’(Silviacum), Assé le Béranger(Asciacum). 

St. Thuribe en consacre 39 autres, parmi lesquelles Solemnié(Solesmes), Auronium(Evron), Novus vicus(Neuvy), Busiacum(Boussay).

Saint Pavace, une douzaine entre lesquelles Rouez en Champagne(Rusiacum),

Saint Liboire, dix sept, entre autres Coulans, Poillé(Pauliacum), Sablé.

En ajoutant tous ces noms ceux de Courceriers et de Torcé en Charnie, pareillement peu distants de Joué, et dont l’étymologie adoptée de Curia coesaris et de Turris coesaris, dénoncent  une orgine assurément romaine, nous aurons réuni, autour de Joué, un nombre assez grand de vici gallo-romains, pour nous demander si un semblable n’y était pas installé, dès cette époque reculée.

La réponse sera affirmative, mais elle n’aura tout juste que la valeur de notre unique et mince autorité, basée sur l’argumentation suivante.

Assez ordinairement, on constate l’existence d’un homme par son nom et ses œuvres.  L’on doit également reconnaître l’identité d’un lieu par le nom qu’il porte et les œuvres qui s’y produisent.  Or le nom de Joué, celui de Palais, de la Crespinière, peut-être même Mayet, petite montagne à l’est du bourg, sont des noms romains.  De plus, l’atelier de céramique, au village de la poterie, l’établissement des forges à bras, (au lieu du même nom), avec leurs innombrables scories, éparses de tout coté, sont l’ouvrage des Romains.

Depuis la rédaction de ces lignesn une nouvelle route vicinale a été construite dans la région ouest du territoire de la commune. Ce chemin, commencé l’année dernière, en 1879, et que nous avons indiqué à la 1ère page de cet ouvrage, est classé sous le n° 9 ; il conduit à travers la Lande de Joué, du bourg à la route départementale n° 5, et aboutit juste en face de la petite closerie de l’Enclos, connue vulgairement sous le nom du Sabot.

Les ouvriers terrassiers, employés à la construction de ce nouveau chemin, en creusant dans un pré, dépendant croyons-nous des Bois-Gouffiers, et peu distant de la route départementale, mirent à découvert un amas considérable de scories de fer mêlées à des débris de poteries évidemment antiques. Ces scories et ces débris ont été mis à part par l’entrepreneur des travaux qui les a fait servir au premier encaissement du chemin sur une longueur d’une ou deux centaines de mètres.

Nous avons nous même recueilli quelques-unes de ces scories qui nous ont paru les plus remarquables, avec une certaine quantité de terre ou poussière de briques romaines. Elles sont pour nous une nouvelle confirmation de ce que nous avançons à l’article visé par cette note, et doivent à nos yeux ne point laisser de doute sur la présence, à Joué, d’anciens établissements romains, tels que forges (à bras), ateliers de céramique, poteries, etc…

La conclusion sera donc que Joué a du être un vicus gallo-romain.

Maintenant pour démontrer chaque partie du raisonnement, il n’est pas nécessaire d’insister beaucoup sur les scories de Forges à bras.  Il est évident pour tous les habitants de Joué, que même aujourd’hui, dans les champs pourtant mieux cultivés, les scories de fer appelées sornes, seurnes ou çornes par le vulgaire, ne sont pas rares.   Les landes de Montreuil, surtout celles de Joué nommées aussi landes du Girouard ou Giroir, en étaient littéralement couvertes, avant qu’on en eût extrait des centaines et centaines de charettes pour l’encaissement de la grand’route de Laval, vers 1830.

Pour la poterie nous ne pouvons que répéter ce que nous avons dit plus haut, à savoir : que ce nom nous semble un indice du séjour des Romains.  Cependant la proximité du tumulus celtique de cette motte voisine dont il a été question, nous fait parfois songer que cet atelier de potiers, pouvait être lui même le siège du vicus, et qu’ainsi le premier emplacement de Joué a pu être le village de la Poterie.

Quand au nom, la colline ou montagne du Mayet (Mayer), la plus élevée de la commune, a du être pour les romains le « mont major », d’où par corruption, le mayeur, le mayer, mais…Transeat !  Nous n’en disons pas autant des autres, leur certitude latine à nos yeux, du moins, est inattaquable.

Crépinière, antique castel, aujourd’hui détruit et dont nous parlons plus loin tout au long (Crispini oedes), ne saurait avoir d’autres origines que Crispinus, ou Crispina, ou même Crispus.

Le célèbre historien romain Salluste, né en l’an 89 avant J.C. portait ce dernier nom, ainsi qu’un fils de l’empereur Constantin-le-Grand, mis à mort l’an 321  et l’impératrice Augusta Bruttia, épouse de l’empereur Commode, portait celui de Crispina (178/183).

Assurément c’était du bon latin.

Pour le nom de Palais, les auteurs compétents se sont prononcés avant nous.  Ils y voient tous, au dire de Pesche (dict.Stat.Hist. de la Sarthe) une légère altération du nom de Palès, la déesse des bergers, des pâturages, la protectrice des troupeaux chez les romains.

Rappelons seulement, pour confirmer le rapprochement des deux termes, que l’orthographe usuelle de ce mota varié de Paleis (forme la plus ancienne) Palez, Pallès, en Palais (orthographe actuelle).

Il y a ici une objection à laquelle nous voulons répondre.

Une rivière comme le Palais arrose plusieurs communes ou territoires : son nom doit prouver pour toutes ou pour aucune.

L’objection a raison jusqu’à moitié. Oui, le nom de Palais prouve pour tous les territoires traversés par la rivière, en ce sens que tout le pays, étant alors soumis aux romains, a du être visité, exploré, ou tout au moins connu par eux.

Mais l’autre membre du dilemme est simplement faux.   Car si la preuve s’applique à tous, rien n’empêche qu’elle s’applique surtout à un lieu déterminé.  Or la rivière nommée Palais, qui prend sa source dans la grande charnie, entre Torcé et Voutré, arrose successivement les communes de Viviers, Neuvillette, Chemiré en Charnie, Joué et un peu Mareil où elle se réunit à la Vègre. Cependant, la commune de toutes les plus favorisées par un ruisseau, celle qui fertilise davantage par son cours plus prolongé et ses eaux plus abondantes, c’est incontestablement la commune de Joué.  Tandis qu’il ne fait qu’effleurer, pour ainsi dire, les autres lieux il traverse de part en part le territoire de Joué, depuis l’extrême frontière nord jusqu’à sa limite sud, fournissant un cours de six kilomètres au moins, pendant lequel il reçoit les eaux de plus de quatre affluents.   A ce compte il ne peut être donc téméraire  de soutenir que le Palais est proprement la rivière de Joué, et que c’est surtout en ce dernier lieu qu’elle a du recevoir son appellation latine de Palais.

Il ne nous reste plus maintenant qu’à établir l’origine romaine du nom même de Joué.

D’où vient donc ce mot et que veut-il dire ?

Les auteurs manceaux qui se sont occupés d’étymologie locale, sont partagés.  Pesche, l’un des plus autorisés, qui traduit par Jocondiacum et Jouénium, commence par dire que Joué peur venir du latin Jocularis (plaisant), ou Jucundus (agréable) , ou Gaudialis (réjouissant), expressin qui désignent une situation agréable, telle qu’est celle du bourg, dominant la grâcieuse et fertile vallée du Palais.  Mais ce même historien déclare plus loin qu’il faut voir dans le mot Joué, une dérivation du mot latin, Jovis(Jupiter).

Cauvin sur sa carte du Maine au 12ème siècle, n’hésite point à écrire Gaudiacus in Charnie, à la place de Joué en Charnie, mais sans appuyer son dire.  Néanmoins il laisse entrevoir ses motifs (géographie ancienne de la Sarthe), ce sont les noms suivants qu’il a trouvés dans des chartes du X1ème siècle (1086) Lisiardus de Gaudiacd Lisiard de Joué, et Warinus de Gaudiacd Guérin de Joué.

Il avertit en outre que l’histoire manuscrite de l’abbaye de la Coulture écrit Jovegum in Charnie ; le cartulaire de la même abbaye Jocium, et  l’état du luminaire Joucium in Carnio (Joué en Charnie).

Enfin un titre de juin 1238, en texte latin dont nous avons lu la copie, mentionne Joué et l’écrit Joeyacum et Joyeacum in Charnie. 

A notre avis, de tous ces noms il résulte une conclusion unanime, c’est que l’origine du mot Joué doit être demandée à la langue du peuple-roi, mais la question n’est pas résolue par là ;  nous pensons qu’elle ne peut l’être qu’à la condition d’admettre pour racine primitive de ces diverses appellations, le nom latin de la  1ère divinité romaine Jovis (Jupiter).   Pour le nom moderne de Joué, la dérivation est d’une facilité telle qu’elle exclut toute discussion.   Joué en effet a été longtemps la forme scripturale de Jove ablatif de Jovis, par la raison que le V, qui s’est appelé l’U consonne, a pris longtemps sa figure, dans l’écriture cursive.   Mais les romains qui ne connaissait que le signe V pour écrire l’U et le vé, le prononçaient ou ; ils n’avaient donc pas d’autre manière de prononcer Jove que Joué.   Pour les autres expressions : Gaudiacum, Gaudiachus, Gaudialis, Jocondiacum, Joyeacum, Joeyacum, Jovegum, Jouénium , Joucium ou Joveium,

Joieum, elles n’appartiennent point à la langue contemporaine de l’empire ; leur présence  sur des documents remontant tout au plus au XIème siècle, ne permet aucun doute à ce sujet.

L’on sait en effet que la langue latine n’était plus parlée en France dès avant le IXème siècle.   Elle avait été remplacée par une nouvelle, la langue romane, formée d’éléments celtiques, latins et gaulois, divisée en deux principales branches, le roman Wallon, au nord, et le roman provençal au midi.    Les mots susdits ne sont donc qu’une traduction, en basse latinité, du nom vulgaire que Joué devait porter en cette langue romane qui persiste jusqu’au XIIIème siècle environ.

Mais quel était ce nom ?…  D’un coté, le radical  des mots précités Gaudiacum, etc…, accusant un terme qui renferme une idée de joie, de bonheur ;  d’un autre coté, cette idée de bonheur se trouvant à sa perception dans le nom de Jupiter, nous ne pouvons nous refuser à croire que cet antique nom fut le plus simple, le plus clair, le plus naturel, le plus obvie, le dérivé de Jovis,  Joué ou Jovie, qui du reste s’est écrit parfois Jouix.  Des étymologistes consommés ont souvent assigné ce radical à des expressions similaires.  Ainsi l’on a fait venir le mot Montjoie ou Monjoie  de Mon Jovis.  Soit ! il n’y a plus de témérité à reconnaître la même origine au mot  Joué.  En pareil cas, à moins de preuves opposées manifestes, il nous semble illogique d’aller chercher au loin des étymologies embarrassées.  Cela peut paraître plus docte, mais à coup sûr, cela peut s’éloigner davantage de la vérité.

Eh ! bien, et c’est à ce quoi nous voulons y venir, ce nom de Jovis  Jouix.  Jove Joué, indique à lui seul un vicus gallo-romain.

Comment, en effet admettre que ce nom sacré pour les Païens, a pu être attribué à un lieu désert et inconnu ?   Comprend-on  que les romains aient ainsi donné le nom auguste du père de leur dieu à un territoire délimité, sans qu’un édicule sacré, un temple, un autel, une statue, une colonne, un arbre sacré, une fontaine, un  monument quelconque ne vint en rappeler le culte et le souvenir, et sans qu’aucune réunion d’hommes, si minimum qu’on la suppose, ne fut là pour veiller à la garde de ce culte et de ce souvenir ?…

Nous aimons mieux rester dans la vraisemblance et conclure à l’existence politique de Joué, durant la période gallo-romaine.

Mais ici une objection se présente qui appelle notre attention.  Le  Pontifical du Mans, parlant des églises fondées au 1er et au 2ème siècle, par Saint Julien,  1er évêque du Mans, cite l’église de Joué, écclesiam de Jacono.   D’où il suit que si Jaconum est le mot primitif de Joué, toute notre argumentation sur le mot Jovis Joce croule…

Nous répondons que :

1erement  que cette traduction du mot latin Jaconum par celui de Joué, est toute fantaisiste, et n’est alléguée que par  un auteur de nous connu, l’éditeur du manuscrit ( histoire du Mans)  de Guyard de la Fosse, faussement attribué à Dom Colomb. Cet auteur, Mr Richelet, prend soin lui-même d’avertir le lecteur, qu’il ne garantit pas l’exactitude de ses versions.

2èment qu’il y a dans le diocèse deux lieux portant le même nom de Joué, et que ce Jaconum qui dans l’énumération du pontifical, vient aussitôt après Baladonum (Ballon), peut être bien le nom latin de Joué l’abbé, au doyenné de Ballon.

3èmement   que ces noms de lieu, extraits d’anciens manuscrits, varient suivant les copistes, et que d’après l’auteur susdit lui-même, l’on n’est nullement certain de l’orthographe de Jaconum qui a pu être toute autre chose, dans le principe, par ex. Jocosum même signification que Gaudiacum.

4èmement enfin qu’en admettant la nullité des observations précédentes et la certitude du fait en lui-même, c.a.d. de la consécration de l’église de Joué par Saint Julien, notre argumentation sur le mot  Joué  croule toute entière, si l’on veut, mais en revanche le but suprême de cette argumentation est complètement atteint, à savoir l’existence à Joué, d’un centre d’habitation, autrement dit d’un vicus gallo-romain au 1er siècle de l’ère actuelle.   

Il faudrait maintenant relater l’établissement du Christianisme, ses commencements  et ses progrès,  dans cette villa gallo-romaine.

Malheureusement la chose est impossible.  Elle ne le serait plus et notre tâche serait vite remplie, si le Jaconum mentionné plus haut, était bien le Joué qui nous occupe.  Nous n’aurions qu’à félicité cette église de Joué en Charnie d’avoir eue l’honneur de la visite et des prédications efficaces de l’apôtre du Maine, Saint-Julien.

Mais nous l’avons vu, le fait n’est aucunement prouvé.  Quoique la simple raison nous dise que, Julien envoyé de Rome pour planter l’évangile chez les Aulerces Cénomans et autres, n’a pu pourtant pendant les 47 années de son épiscopat, rester tranquillement au Mans les bras croisés, mais a dû au contraire parcourir sans cesse les lieux habités de son territoire, pour y fonder par sa parole et ses miracles la nouvelle doctrine ; quoique, par ailleurs, l’histoire et la tradition nous aient appris la présence de ce même Julien dans les environs de Joué, à L’Isle, à Chevillé, à Brûlon, à Saulge, etc …, malgré cela nous n’affirmons pas sa présence à Joué, et nous ne lui attribuons pas l’érection de l’église primitive, par la raison que les preuves positives nous font totalement défaut.

A vrai dire, nous rêvons pour cette paroisse une origine moins noble, quoique moins reculée.

Voici dons notre opinion personnelle avec les raisons qui militent en sa faveur.   Incontestablement, Saint-Martin évêque de Tours, est en possession d’un culte spécial à Joué, la paroisse est érigée sous son vocable, le prieuré antique, dont nous parlerons ci-après, l’était également.    La fête patronale du village, qui, dans notre siècle matérialiste, a dégénéré en fête toute profane et en occasion de débauche et de désordre, est la fête Saint-Martin.

Une rue ou plutôt une ruelle du bourg, qui accède de la route nationale  à la place de l’église, porte le nom de rue St. Martin.  Une fontaine intarissable, sise au bas de ce petit chemin, et qui alimente deux puits avec un lavoir public au nord-est de la place de l’église, est aussi décoré du nom de fontaine St. Martin.   Cette dernière a donné naissance à un petit fief nommé la Fontaine, dont les possesseurs fondèrent une prédimonie   dans l’église de Joué.  Ajoutons que toutes ces dénominations sont immémoriales, et qu’elles confondent leur origine avec l’origine de l’église elle-même.

L’on ne dira pas que ces diverses circonstances qui rappellent St. Martin, sont l’effet d’un pur hasard et ne repose sur aucun fondement.

Ce serai simplement absurde,  eh ! bien, ce fondement, il nous semble en trouver au moins un vestige, une ombre, dans l’histoire de la vie de ce grand Saint qui illustre le siège épiscopal de Tours depuis  l’année 372 jusqu’à sa mort qui arriva l’an 400.

Voici ce que nous lisons dans les petits Bollandistes, tome XIII, page 328 et suivante :

Bientôt l’ambition surnaturelle de cette âme sublime (St. Martin) se trouva trop à l’étroit dans les limites de Tours.  Après avoir visité et renouvelé son diocèse, l’homme de dieu se sentit pressé d’étendre au dehors, jusque dans les paroisses les plus lointaines, ses courses et ses travaux.  Vêtu d’une pauvre tunique, recouvert d’un manteau noir fait d’un poil grossier, monté sur un âne et emmenant avec lui comme auxiliaires quelques-uns de ses religieux, le voilà qui part en pauvre missionnaire pour évangéliser les campagnes et y extirper les restes de l’idolâtrie ; car c’est là le lot qu’il a choisi, la tâche qu’il s’est imposé.

Doué d’une activité prodigieuse comme son zèle, il parcourt presque toutes les provinces des Gaules, combattant partout et toujours en vainqueur le vieux paganisme  qui fuyait, forcé d’aller au loin zse cacher pour échapper à la poursuite et aux conquêtes de l’évangile. Rien ne peut arrêter les pas de l’infatigable soldat de Jésus Christ : ni les âpres montagnes de l’Avergnée(auvergne), ni les plages et les rochers sauvages de l’Armorique(bretagne), ni les vastes forêt du pays des Carnutes(chartres), ni le rude pays du Morvan(Bourgogne), lointaines et dernières retraites du Druidisme déjà chassé des villes.   Précédé de son immense réputation, entouré de l’éclat et fort de l’influence d’une vertu surhumaine, n’ayant d’autres armes que les armes de dieu, la croix, la prière, la pénitence, une charité sans bornes, une foi à transporter les montagnes, et le pouvoir divin d’opérer  des prodiges, partout, nouveau et pacifique conquérant, il attirait, il soumettait les populations à l’empire du divin maître.  Partout il étouffait, dans leur berceau, les superstitions celtiques, renversait les arbres sacrés, restes du fétichisme primitif, les temples, les autels, les statues des faux Dieux ; ayant soin d’élever à la place une église, un oratoire, une cellule, où il laissait, selon les circonstances un ou plusieurs religieux, pour soutenir son œuvre ou plutôt l’œuvre de dieu, et cultiver le mystérieux grain de Sénené qu’il avait semé en passant.  Saint Martin passe pour le premier qui, dans la province de Tours et même dans toute la Gaule, ait fondé des paroisses rurales, ce qui a surtout contribué à le faire regarder comme l’apôtre des campagnes.

C’est ainsi que par une profonde intelligence de la nature humaine, afin de gagner plus facilement les peuples, et favoriser davantage la propagation de la foi, il n’oubliait pas de conserver, autant que possible, à tel temple, à tel autel, à tel lieu, la célébrité que leur avaient faite la superstition et le concours des Païens ; ayant pris soin, dans le même endroit, aux criminelles et ridicules pratiques de l’idolâtrie, les belles et pures cérémonies, les fêtes douces et sanctifiantes du culte chrétien, le sacrifice non sanglant de l’adorable victime.

Dans un autre passage du même livre, nous trouvons ce qui  suit : dans ses cours apostoliques, il (Martin) pénétrait  jusqu’au fond des campagnes les plus reculées.  Les pauvres paysans, grossiers, ignorants, et pour la plupart encore idolâtres, furent toujours le principal objet de ses soins.  Il allait les chercher partout, les instruisait avec une aimable sérénité, les consolait avec une bonté touchante, les subjuguait par l’ascendant irrésistible de sa parole évangélique, par ses exemples surtout, par sa douceur, par sa sainteté appuyée du don des miracles ; et toujours sur son passage disparaissaient les anciennes superstitions du paganisme romain ou gaulois.

Nous  avons tenu à citer ce long extrait pour montrer à tous les yeux, l’extrême probabilité, la quasi-certitude d’un voyage de Saint-Martin dans nos contrées.  Tous les historiens de sa vie sont unanimes à constater ce caractère particulier de sa carrière épiscopale, et l’on peur dire que ce sont ces courses incessantes, signalées par des miracles presque  quotidiens, qui lui ont valu le surnom de Grand Thaumaturge des Gaules.  D’innombrables églises, chapelles, oratoires, monastères, prieuré, élevés en son honneur, couvrent le sol de France, et y sont presque toujours les vivants témoins de son passage.

Le diocèse su Mans, voisin et suffragant de  celui de Tours, n’occupe pas la dernière place dans ce concours d’hommages rendus à la mémoire de St. Martin.  Nombreuses y sont, en effet, les églises dédiées au Saint-Evêque.  Pour ne parler que du seul canton ecclésiastique  de Loué, quatre églises paroissiales sont érigées sous son vocable : Amné en Champagne, Coulans sur Gée, Joué en Charnie, Tassillé. 

D’un autre coté, l’histoire locale du Maine nous donne pour certain la présence de St. Martin au Mans, où il vint à plusieurs reprises, mais spécialement en juillet 397 présider les obsèques de saint Liboire et lui désigner un successeur sur le siège de saint Julien.  On sait, de plus, qu’une paroisse du diocèse, la fontaine St. Martin, du doyenné de Pontvallain, s’honore d’avoir été le théâtre de sa parole et de ses prodiges.

Nous sera t-il défendu de penser que la même chose a pu se produire à Joué, et que les noms de Fontaine St. Martin, rue St. Martin, église St. Martin, prieuré St. Martin de Joué, immémoriaux dans la paroisse, ont eu  pour origine un événement analogue à celui de la paroisse précitée ?

Martin lisons-nous plus haut, dans ses courses évangéliques, affectionnait surtout les campagnes reculées, où l’éloignement des villes et l’ignorance des habitants offraient un dernier abri  au druidisme et paganisme expirant. Joué n’était-il point dans ce cas ?… 

La ville la plus rapprochée, Vagoritum, en était encore à 20 kilomètres au moins, et peut être était-elle déjà détruite ?… (Cauvin, dans sa statistique de la Sarthe pense qu’au 3ème et 4ème siècles, le territoire des Arviens était déjà réuni à celui des Cénomans)  Le Mans (Suindunum ou Cénomanum ), en était  à plus de 30km, et Jublains ( Noiodunum ou Diablenticum) à 40 km environ !..

Martin, partout où il passait, détruisait les cultes des faux dieux, renversait leurs autels, leurs statues, leurs arbres sacrés, tous les monuments de l’idolâtre, et leur substituait un oratoire, une cellule, un établissement religieux quelconque, où il laissait un ou plusieurs clercs, chargés au maintien du culte nouveau.    Mais Joué dont le seul nom, avons nous dit, indique l’existence d’un culte rendu à Jupiter (Jovis), n’était-il point dans ces conditions ?   Cette forêt immense de la Charnie qui l’entourait, ne pouvait-elle, disons mieux ne devait-elle pas contenir quelque chose comme un antique Dolmen ou menhir (colonne), un bois sacré (lucus), un arbre druidique, un autel, une statue, une tombelle (tumulus), peut être celle que nous voyons encore aujourd’hui au bord du Palais, … ou même cette propre fontaine qui porte aujourd’hui le nom du Saint, ne pouvait-elle pas être alors l’objet d’un culte spécial et consacré au grand Jupiter, le roi et le père des dieux antiques ?.

Dès lors, sera t-on taxé d’impertinence et de déraison, si l’on admet que Martin à son passage, a du renouveler cet idole ou cet autel, ou ce bois sacré, ou cet arbre druidique, ou cette colonne, ou ce dolmen supposés, l’acte d’une sainte indignation qui lui briser, partout où il les rencontrait, ces monuments abjects d’une honteuse idolâtrie ?…

Et si l’on trouve par trop fantaisiste cette intervention personnelle de St. Martin au vicus gallo-romain de Joué, qu’au moins on nous laisse croire que ses disciples, les clercs ou religieux qui l’assistaient dans ses courses apostoliques, accomplirent en son nom et place, ce que lui-même accomplissait en tant d’autres lieux.

Nous ne demandons ni merveille, ni prodige ; pas même le miracle si commun d’une source jaillissant de la terre, à la voix de Thaumurge, comme à la fontaine St. Martin.  Nous ne demandons rien que du conforme à la froide raison historique, à savoir : la présence d’un saint qui a voyagé par toute la France, et dont une majeure partie de l’existence s’est écoulée à 30 lieues  de Joué, tout au plus ;  La prédication de l’évangile  par ce saint à ses disciples ; La destruction d’une idole ou monument quelconque d’un culte faux, succombent partout à cette époque ; et enfin l’érection d’un établissement chrétien, lequel plus tard, lorsque les moines de l’ordre bénédictin vinrent s’y fixer, est devenu dans leur langue intelligente et respectueuse du passé, le Prieuré Sanctus Martinus de Jove, saint Martin de Joué.

Nous avons fini cette trop longue dissertation, libre au lecteur impartial de juger si nous sommes dans l’illusion.  Nous, nous croyons être dans la vérité, du moins dans une sage vraisemblance.

En tous cas, et nous le répétons, ce n’est qu’une simple opinion personnelle que nous donnons  pour ce qu’elle vaut.

Abbé Coutard

(¹) Cette butte fut nivelée fin 1972 par  monsieur Breton, cultivateur à Joué.